mardi 18 octobre 2016

Un René Lévesque prophétique...

René Lévesque aurait-il dit ceci, cela, s'il avait vécu jusqu'en 2016? On ne le saura jamais. Ses paroles et ses écrits étaient fondés sur les connaissances et perceptions qu'il avait au moment de les prononcer ou de les rédiger. Voici un texte qu'il a réellement signé en 1973...

« À cause des menaces aussi bien que des promesses qui se profilent à l'horizon, il le faut pourtant (se défaire de notre mentalité de colonisés), et avant trop d'années. Les menaces: elles sont démographiques, culturelles et sociales.

« Ainsi, alentour de 1980, la dernière grande vague de natalité d'après-guerre aura atteint l'âge adulte et la société québécoise, pendant un nombre d'années dont on ne voit pas encore la fin, plafonnera numériquement. Dans un pays fédéral dont la politique d'immigration tend naturellement à renforcer la majorité anglophone, elle aurait alors toutes les chances de décliner et de commencer à subir cette assimilation par la noyade, vieux rêve du conquérant que seule notre ancestrale "revanche des berceaux" empêcha jadis de se concrétiser.

« Culturellement, il va de soi que ce déclin démographique saperait bientôt la vitalité débordante, mais encore si jeune et foncièrement complexée, du nouveau Québec français.

« Quant à l'animal social très particulier qu'est l'homme d'ici, l'occasion qui passe pour lui de se forger un contexte à la fois original et fécond, qui reflète nettement son identité et lui serve de chantier pour son apport propre à l'ascension laborieuse de l'humanité -- cette occasion risque d'être chauve terriblement vite! Les cheveux qu'elle a, s'ils ne sont pas saisis sans trop de délai, risquent de tomber pour ne plus jamais repousser.

« Car notre version à nous de la crise universelle des structures sociales, elle s'inscrit sur un arrière-plan de fragilité toute spéciale. La société québécoise ressemble un peu au homard en saison de mue, sa vieille carapace émiettée est, jusqu'à la repousse, extrêmement vulnérable. Notre carapace, faite des valeurs de la "survivance" (cléricalisme étouffant mais encadreur, "langue gardienne de la foi", agriculturisme), achève de voler en éclats, même les plaques les plus coriaces s'écaillant peu à peu dans les régions rurales à mesure que s'effectue la relève des générations.

« Charriée par tous les courants torrentueux de notre époque, la société québécoise a donc le besoin pressant d'un nouvel encadrement, de ce minimum vital de "consensus", faisceau toujours mystérieux des liens et des modèles qu'on accepte, sans quoi elle serait, plus que toute autre peut-être, en danger de désintégration irrémédiable.

« Or, ce consensus nouveau, ce cadre vital, on n'en voit nulle part la perspective solide si ce n'est dans l'indépendance. »

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René Lévesque, extrait de l'introduction au volume Québec-Canada, de la série «L'humanité en marche». Les Éditions Fides, 1973.

samedi 15 octobre 2016

Imaginer octobre 1970 sans la «crise»?


Dans son roman 22/11/63, Stephen King tente d'imaginer ce que serait devenu son pays et le monde si on avait pu, en retournant dans le passé, éviter l'assassinat de John F. Kennedy. On ne saura jamais à quel point la vision d'apocalypse qu'il projette aurait pu être plausible, mais cela donne tout au moins un scénario fascinant. C'est une technique qu'a aussi employée Éric-Emmanuel Schmitt dans La part de l'autre pour imaginer ce qu'aurait été la vie d'Adolf Hitler si ce dernier était devenu artiste…

En relisant un vieux numéro du 26 septembre 1970 du Quartier latin, l'ancien magazine des étudiants de l'Université de Montréal, la machine à voyager dans le temps a embrayé et j'ai pu entrevoir des événements qui auraient pu remplacer notre «crise d'octobre» si deux cellules du Front de libération du Québec n'étaient pas intervenues, une pour enlever le diplomate James Cross (5 octobre), l'autre pour kidnapper (10 octobre) et assassiner (17 octobre) le ministre Pierre Laporte, sur fond de mesures de guerre (16 octobre) et d'emprisonnements injustifiés de centaines d'innocents. 



Sous le titre FLQ versus la patente judiciaire, l'article non signé du Quartier latin annonce un automne chaud axé tout autant sur le FLQ, mais se déroulant essentiellement devant les tribunaux. Il faut rappeler que dans le sillage de l'élection vivement contestée d'avril 1970, de la victoire de Robert Bourassa, du coup de la Brinks, et de la maigre récolte de sept députés pour le PQ qui, à son premier scrutin général, avait récolté 23% des voix, un vent de révolte s'annonçait, particulièrement au sein de la jeune génération.

En juin 1970, la police avait arrêté le felquiste Claude Morency à Prévost, au nord de Saint-Jérôme, et l'avait accusé avec ses camarades François Lanctôt et André Roy d'avoir conspiré pour enlever l'ambassadeur des États-Unis au Canada, Harrison Burgess, d'avoir commis un vol à main armée à la caisse pop de l'Université de Montréal, et d'avoir été en possession illégale de dynamite. Or, le procès de Morency devait avoir lieu (et a de fait eu lieu) le 9 octobre 1970. Et on y prédisait de la bisbille…

Selon le journal étudiant, les accusés avaient l'intention de ne pas respecter les règles du tribunal et les rapports traditionnels autorité-accusé. Ils allaient d'abord clamer leur refus «d'être jugés par un homme qui tient son rôle social de par ses influences politiques». Le procès des «trois du FLQ pourrait provoquer une grande foire dans l'édifice sinistre de la rue Notre-Dame», ajoutait l'auteur du texte.

Par ailleurs, on prévoyait à l'automne une abondance de procès politiques qui auraient pu devenir des points de ralliement pour des actions de contestation :

- les causes de Pierre Vallières et Charles Gagnon, toujours en attente;
- le procès de Pierre Marcil, accusé de conspiration pour l'enlèvement du délégué commercial d'Israël à Montréal;
- le procès d'Yves Bourgault, accusé de sédition et de possession d'explosifs;
- la comparution des 21 de la Maison du pêcheur à Percé;
- la reprise des procès de Reggie Chartrand, Raymond Lemieux et Laurier Gravel, également accusés de sédition; ainsi que
- les procès et sentences de matraqués du 24 juin 1968, et les procès d'accusés dans l'affaire raciale de Sir George Williams (11 février 1969).

Et comme si cette «pluie» de procès de felquistes et d'indépendantistes, déjà porteuse d'éclairs, de coups de tonnerre et de bourrasques potentiellement violentes, ne suffisait pas, le journal des étudiants de l'Université de Montréal invitait ses lecteurs et lectrices à «ridiculiser cette immense patente (judiciaire) qui opprime les Québécois» en posant des gestes de provocation dans les salles de tribunaux. Voici quelques suggestions offertes à titre d'exemple par le Quartier latin:

« - Lancez des confétis.
- Laissez tomber sur le plancher des couleuvres, des crapauds, des criquets, des tortues, des souris.
- Lancez des billes (smokes) sur les calorifères.
- Que tous les spectateurs se lèvent en même temps et fassent le geste de lancer un objet vers le juge. Une seule tomate ou un seul oeuf s'éfouère dans la face du juge… alors tout le monde est safe.
- Gazouillez comme des petits zoiseaux…
- Jappez quand un flic témoigne pour la Couronne.

Il faut que les accusés se sentent appuyés par les militants.»

Quand le Quartier latin a publié son numéro suivant, le 9 octobre 1970, on ne parlait plus - on ne parlerait plus jamais - d'un tel scénario. On n'y publiait que la manifeste du FLQ, lu également sur les ondes de Radio-Canada et ailleurs, d'autres événements ayant été mis en marche. On connaît la suite. Je m'en souviens pour avoir couvert la crise d'octobre comme journaliste. Les plus jeunes la retrouveront dans les livres d'histoire. Mais un bon rédacteur de romans, amateur d'histoire-fiction, pourrait bricoler un passionnant «que-serait-il-arrivé-si...» avec cette page d'un magazine étudiant publié à peine quelques jours avant l'entrée en scène de la cellule Libération...

vendredi 14 octobre 2016

Médecine en anglais. Déjà l'oubli?

Si Toronto décidait d'imposer aux Franco-Ontariens de nouveaux programmes d'enseignement post-secondaire totalement ou partiellement en anglais, sans faire d'efforts pour les offrir en français, on aurait droit à une levée de boucliers. Des députés, des maires, des conseillers municipaux et scolaires, des professeurs, des porte-parole d'organisations prendraient le micro sur la place publique pour défendre le droit des francophones d'étudier dans leur langue. Et on les féliciterait d'agir ainsi.

Alors quand Québec propose aux francophones de l'Outaouais une faculté de médecine signée McGill où la totalité de l'enseignement magistral se fera en anglais, pourquoi nos élus locaux et régionaux, nos universitaires (administrations, profs, étudiants), et les diverses organisations intéressées à l'éducation et à la santé n'ont-ils d'autres réactions que d'applaudir béatement ou de garder un silence de mort? Faut-il conclure, contrairement à l'Ontario où c'est une vertu patriotique, que défendre la langue française sur la rive québécoise de l'Outaouais est devenu suspect ou hasardeux?

Cette semaine, à l'émission Mise à jour Outaouais de MaTV (Vidéotron), l'animateur David Coulombe,  pourtant journaliste chevronné, prof de journalisme et communications, a réussi à interroger deux intervenants majeurs en santé sur le projet de faculté satellite de médecine à Gatineau sans même que le dossier de la langue d'enseignement ne soit abordé. Pire, dans le préambule de ses questions à Jean Hébert, PDG du CISSSO (Centre intégré de santé et de services sociaux de l'Outaouais), et Marcel Guilbault, président de l'Association des médecins omnipraticiens de l'Ouest du Québec, M. Coulombe a affirmé que le projet de McGill était une «bonne nouvelle»…

D'accord, l'émission portait d'abord sur la disponibilité et la qualité des soins de santé en Outaouais, mais si l'animateur sentait le besoin d'inclure parmi les solutions d'avenir la présence d'une formation médicale à Gatineau, comment pouvait-il faire abstraction de l'obligation de suivre 18 mois de classes en anglais, dans une région à 80% francophone où le travail sur le terrain se fera essentiellement en français? N'avait-il pas lu les éditoriaux et chroniques de protestation dans Le Droit, dans Le Devoir, dans le Journal de Montréal, les interventions d'experts dans les pages d'opinion et au moins une dizaine de lettres de lecteurs dans le quotidien local?

Quoiqu'il en soit, ni M. Hébert ni M. Guilbault n'ont saisi l'occasion offerte pour parler du besoin de donner les cours de médecine en français sur leur territoire. On aurait cru qu'ils n'étaient pas au courant (le sont-ils?), ou que cet enjeu n'avait aucune importance pour eux. Le président des omnipraticiens a même qualifié l'arrivée de McGill et de sa faculté satellite d'«excellente nouvelle» pour la région, ajoutant que l'Université du Québec en Outaouais pourrait en profiter pour créer d'autres programmes en santé… Anglicisez nos étudiants et étudiantes en médecine, cela ne nous préoccupe pas, semblent-ils dire. Hé, comme l'indiquait M. Couillard, après tout on est chanceux, c'est McGill… Wow

Le seul médecin qui paraît vouloir s'impliquer publiquement dans le dossier jusqu'à maintenant, c'est le Dr Gilles Aubé, mais il est porte-parole du Parti québécois. C'est compréhensible. Québec solidaire a aussi signé une déclaration énergique. La CAQ est allée jusqu'à soulever cette affaire à l'Assemblée nationale, et la ministre responsable de l'Outaouais, Stéphanie Vallée, s'est dite «un peu estomaquée» par la question, ajoutant toutefois que l'intention du gouvernement était d'offrir un jour une formation 100% en français… Ni M. Couillard ni M. Barrette n'avaient promis ça…

Jusqu'à maintenant, un seul groupe de pression de l'Outaouais, Impératif français, tente de mobiliser l'opinion publique pour défendre le droit d'étudier la médecine en français à Gatineau, et le besoin de confier cet enseignement à une institution autre que McGill, qui avoue ne pas avoir de ressources en français et ne semble pas intéressée à faire les efforts requis pour les mettre en place. L'Université du Québec en Outaouais devait être un acteur important dans les premières planifications, mais en route, elle paraît avoir été évincée. À l'UQO, le silence sur cette question est assourdissant…

Abordant l'affaire le 11 septembre, le chroniqueur Patrick Duquette, du Droit, concluait en se plaignant qu'en Outaouais «on avale n'importe quoi sans rechigner»… En écoutant l'émission de MaTV, ce 13 octobre, je me suis dit qu'on lui donnait un peu raison… 


mercredi 12 octobre 2016

Que se passe-t-il au Devoir?


Je me souviens, comme si c'était hier, de l'ambiance fébrile au département de science politique de l'Université d'Ottawa au milieu des années 1960. Jeune Franco-Ontarien au sein d'un groupe d'étudiants et étudiantes très majoritairement québécois, j'étais entraîné - et fasciné - par la passion des échanges sur l'histoire et l'avenir du Québec et du Canada. Indépendantistes pour la plupart, mes camarades québécois arrivaient le plus souvent avec un exemplaire du quotidien Le Devoir sous le bras...

Ils avaient beau pester contre Claude Ryan et son équipe d'éditorialistes, ils dévoraient tous les jours les pages du journal et n'auraient pu s'en passer. J'en suis graduellement devenu un fidèle lecteur, et cinquante années plus tard, Le Devoir reste pour moi - et bien d'autres aussi, j'en suis convaincu - ce vieil ami qui nous accompagne dans notre cheminement collectif identitaire. Or, ces derniers mois, il me semble le voir moins assidument au poste… tout au moins en page éditoriale. Est-ce mon imagination, ou quelque chose a-t-il changé?

Il ne s'agit pas ici de savoir si Le Devoir demeure souverainiste ou pas sur le plan de l'orientation éditoriale, mais de son niveau d'engagement dans le débat entourant le statut politique du Québec et les valeurs identitaires qui l'orienteront. Que le nouveau directeur Brian Myles adopte une position moins favorable à l'indépendance que ses prédécesseurs Bernard Descôteaux et Lise Bissonnette n'est pas ce qui me préoccupe le plus. Ce qui me dérange, c'est cette impression que la page éditoriale de notre seul quotidien indépendant semble se retirer du coeur de la mêlée et prendre une position d'attente…

Dans son entrevue au magazine -Trente- de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), à l'automne 2015, l'ancien directeur Bernard Descôteaux affirmait que la mission politique du Devoir était de défendre «l'avancement de la société québécoise, aux plans de la langue, de la culture, de son développement économique, de l'égalité des peuples fondateurs, de son statut politique et de l'autonomie du Québec».

L'équipe que M. Descôteaux dirigeait, ainsi que celle de Lise Bissonnette avant lui, avait conclu que «rien ne pouvait avancer dans le cadre actuel, qu'il n'y avait pas d'espace pour débattre de l'avenir du Québec dans le fédéralisme» et que «c'est toujours le même constat» aujourd'hui. Quant au style d'intervention du Devoir, disait-il, «c'est pas avec des gens plates qu'on fait un journal intéressant».

Après avoir affirmé son «attachement au débat d'idées» et s'être engagé à défendre «cette nation singulière par sa langue, ses institutions ses lois et son identité propres», le nouveau directeur Brian Myles, s'écarte de la conclusion de ses prédécesseurs dans un éditorial d'avril 2016.

«Alors qu'une génération constate que le projet de pays pour le Québec ne se concrétisera peut-être pas de son vivant, il faut énoncer de dures vérités avec une certaine délicatesse à l'égard de ces défricheurs», écrit-il en ajoutant: «la véritable question consiste à déterminer quel cadre est le plus porteur d'émancipation pour tous les Québécois. Nous y répondrons, à l'heure des choix, en fonction de nos principes.»

J'ai toujours cru que pour notre peuple, chaque heure que le bon Dieu amène était «l'heure des choix». Faut croire que non... Et en attendant qu'elle arrive, en attendant cette heure où l'équipe éditoriale du Devoir sera prête à livrer sa grande réponse, je crains qu'on ait droit trop souvent à des silences prudents, alors que les débats les plus intenses doivent se dérouler maintenant, tout le temps, sans retard, sans interruption. Il serait regrettable que les éditorialistes du Devoir ne soient pas constamment sur la ligne de front pour aiguillonner le dialogue identitaire.

Depuis l'arrivée de M. Myles en février 2016, j'ai recensé près de 275 éditoriaux dans Le Devoir, et il me semble - je me trompe peut-être - que le quotidien a manqué de vigueur dans ses interventions sur la langue française, le statut politique du Québec, et d'autres enjeux avec effet identitaire. Seuls une dizaine de tous ces textes éditoriaux concernent directement le sort du français: quatre sur la francophonie canadienne et/ou hors-Québec, trois sur la situation du français au Québec, deux à saveur montréalaise et un sur l'Outaouais. Quand on considère que cette composante clé de notre identité collective soulève à tous les jours des interrogations, ainsi que de fréquentes manchettes, une dizaine d'interventions frise le strict minimum…

On a aussi pu lire depuis février 2016 une douzaine d'éditoriaux que je regrouperais autour du grand thème des valeurs identitaires autres que le français. Il y en a deux sur l'enseignement de l'histoire, deux sur l'immigration, deux sur le port du burkini, deux sur le procès Bain, et quelques autres sur les discours haineux et le «nous» culturel. Encore là, compte tenu de l'intensité des débats et de l'abondance de nouvelles, la page éditoriale du Devoir a fait preuve d'une grande réserve. Et dans une année qui a vu la démission de Pierre Karl Péladeau et une campagne à la chefferie du PQ, je m'étonne de n'avoir trouvé que quatre éditoriaux sur cette question…

Les quelque 250 autres éditoriaux portent sur une panoplie de questions pertinentes à l'international (84 textes), au Canada (81) ou au Québec (80). Quant aux 27 éditoriaux à caractère identitaire (portant sur le français, les valeurs, le statut politique, etc.), ils sont signés en majorité par Antoine Robitaille (14), qui doit se sentir bien seul certains jours, puis par Brian Myles (9) et Manon Cornellier (4).

Se passe-t-il quelque chose d'inquiétant au Devoir? Peut-être pas. Je m'interroge tout simplement. Et je termine par cette citation de l'éditorial d'adieu de Bernard Descôteaux, le 6 février 2016: «Dès le début de son histoire, ce journal a été le fait de la volonté commune de ses artisans et de ses lecteurs, qui depuis un siècle ont cru à la parole indépendante et libre. Qui ont cru à un espace porteur d'une vision de justice, d'égalité et de défense des intérêts collectifs de cette société francophone en Amérique du Nord. Qui ont voulu qu'il soit une force de changement.»

Bien dit, M. Descôteaux. Nous avons besoin du Devoir. Comme défenseur de nos intérêts, comme force de changement. Tous les jours.

jeudi 6 octobre 2016

Alors, gouvernons !

Lettre d'un vieux scribe au nouveau chef du Parti québécois

Page du lendemain de l'échec de Meech...

Cher Monsieur Lisée,

Le débat interminable sur l'échéancier hypothétique d'un futur référendum nous empoisonne depuis trop longtemps. Au sein du public, l'indice d'enthousiasme pour un troisième référendum sur la souveraineté oscille autour de zéro... et les adversaires du Parti Québécois le savent. Ils n'attendent que l'occasion propice pour sortir la masse et asséner un coup qu'ils espèrent fatal


Les ennemis de l'indépendance sont généralement implacables. Ils ne s'embarrassent pas de règles. Pendant qu'en 1980, le gouvernement Lévesque soumettait son projet de souveraineté-association à la population on ne peut plus démocratiquement, l'année suivante la bande à Trudeau-Chrétien complotait dans le plus grand secret, en pleine nuit, avec la majorité des premiers ministres provinciaux pour imposer au Québec - sans la moindre consultation publique - une nouvelle constitution dont l'un des principaux effets fut justement de nier la spécificité québécoise.


N'oublions pas qu'en 1970, pour jeter à la prison une partie de l'opposition indépendantiste, Pierre Elliott Trudeau n'avait pas hésité à invoquer les mesures de guerre en temps de paix (cette loi n'avait servi que deux fois - durant la guerre 14-18 et la Deuxième Guerre mondiale). En 1981, les manigances secrètes de la nuit des longs couteaux ont livré aux tribunaux les outils nécessaires pour démanteler la Loi 101, prélude à une attaque tous azimuts contre le dernier rempart de notre identité - la langue française.


Ce qu'Ottawa n'a pu compléter, le Québec libéral de l'ère Charest-Couillard tente de l'achever en entreprenant de bilinguiser les jeunes Québécois dès la fin du primaire, tout en réduisant presque à néant l'efficacité des efforts de francisation, tant en milieu de travail que dans l'accueil de masses d'immigrants qui finiront par s'angliciser en proportions croissantes. Sans oublier ce marteau du multiculturalisme sauce Trudeau père-fils, qui assomme toute velléité d'inscrire dans nos lois fondamentales des valeurs universelles - laïcité/neutralité de l'État, égalité hommes-femmes - conformes à notre spécificité.


Malgré tout, l'idée d'indépendance reste en vie. Bon an mal an, et par les temps qui courent c'est plutôt «mal an mal an», près de la moitié des francophones du Québec se disent toujours sympathiques à la souveraineté. Et dans l'autre moitié de la population de langue française, le refus de l'indépendance n'entraîne nullement un attachement profond au reste du Canada ou au fédéralisme. Il est toujours possible de rapailler ce qui reste de nous pour une ultime tentative de se libérer du carcan. Mais il faudra faire vite. Les têtes blanches se font très nombreuses et les plus jeunes n'ont jamais connu l'univers dans lequel s'est forgée l'opinion des générations précédentes…


Le Parti québécois doit absolument accéder au pouvoir, majoritaire, dès 2018. Mais cela n'arrivera pas - en dépit du caractère catastrophique de l'administration Couillard - si le principal véhicule du projet d'indépendance traîne ce boulet référendaire qui répugne à la génération montante et ne sert qu'à rappeler les mauvais souvenirs de 1980 et 1995 aux fédéralistes et indépendantistes assez vieux pour les avoir vécus. Larguer l'obsession référendaire n'affaiblira pas la mission première du parti. Au contraire. Au-delà d'un solide programme social-démocrate rassembleur, le PQ doit promettre très clairement de poursuivre l'objectif de l'indépendance par tous les moyens.


On semble avoir oublié, en regardant de trop près les arbres et les branches, que la forêt existe toujours. Le peuple québécois, la nation québécoise est toujours là, avec sa langue et sa culture, ses valeurs partagées, son droit à l'autodétermination bien intact. La Cour suprême du Canada l'a soutenu clairement dans son renvoi de 1998 sur la sécession. Les Trudeau, Chrétien et compagnie ont reconnu eux aussi la nation québécoise - et son droit à l'indépendance - en participant aux campagnes référendaires dans le camp du «Non». Participer, qu'ils l'avouent ou pas, c'était accepter la légitimité du processus… et du résultat.


Ce que le PQ doit proposer, et réaliser s'il est élu, c'est d'agir en porte-étendard fier et digne de la nation, d'un peuple souverain, et de tout faire pour élargir ses champs de compétence, jusqu'à l'éventuelle accession à l'indépendance politique. Il ne sera plus question d'administrer comme «bon gouvernement provincial» en attendant les conditions gagnantes de la souveraineté, mais de se comporter en gouvernement d'un pays à l'horizon, fricoté à nos goûts républicains, dans le respect des limitations actuelles bien sûr mais en perçant des brèches partout où cela sera possible.


Cela signifie, d'abord, discuter d'égal à égal avec le reste du pays, de nation à nation. Finie l'époque des négociations à onze gouvernements. C'est ce qu'avait promis Robert Bourassa après l'échec de Meech, en 1990 (voir photo ci-haut). Rien dans la constitution actuelle ne nous oblige à jouer le jeu à onze… Cela veut aussi dire assumer pleinement la responsabilité des domaines de compétence qui sont déjà nôtres… jusque dans l'arène internationale. Rien n'interdit au gouvernement du PQ de demander l'admission du Québec à l'ONU comme nation fédérée. Il y a des précédents…


Sur le plan linguistique, tout en respectant scrupuleusement les droits historiques des Anglo-Québécois et en suivant de très près le sort réservé aux minorités francophones des autres provinces, le gouvernement du Parti québécois devra rétablir la force originale de la Loi 101 et même l'élargir là où elle l'aurait dû l'être - dans les cégeps, dans les petites entreprises. Une nation digne de ce nom assure le respect de sa langue et de sa culture, en premier lieu par les siens. Il faudra s'attaquer à l'analphabétisme, assurer non seulement la prééminence du français, mais son excellence, parlée et écrite, dans tous les milieux y compris au travail. Le bilinguisme et le plurilinguisme chez les nôtres devront se bâtir sur une solide identité francophone.


En matière sociale, un gouvernement péquiste devra tout faire pour mettre en oeuvre les valeurs d'égalité et d'entraide héritées des générations qui ont bâti depuis plus de 400 ans le Québec français. On nous jugera à la façon dont notre peuple souverain traitera ceux et celles des siens qui ont le plus besoin de la solidarité de l'ensemble - les vieux, les pauvres, les malades, les chômeurs, les mal logés, les jeunes aux études, etc. Les milliards perdus en dédoublement fédéral ou mal orientés à Ottawa par une majorité anglophone, les milliards détournés du fisc par un capitalisme débridé, seront réclamés et récupérés au nom de la nation québécoise pour favoriser la justice sociale dans notre futur pays.


D'effort en effort, d'obstacle surmonté en obstacle surmonté, de petite victoire en petite victoire, le tout clairement orienté vers le projet d'indépendance, la population saura davantage à quoi s'en tenir. Plutôt que d'avoir perdu un temps précieux en palabres pré-référendaires, le projet souverainiste sera enclenché avec tous les moyens disponibles. Si le travail est bien fait, l'appui populaire suivra. Vite, très vite, on ne verra plus le Québec comme province, tant ici qu'ailleurs au Canada, mais comme nation en marche vers une destinée qu'elle a prise en main. Jusqu'où cela nous mènera-t-il? L'électorat québécois, qui aura toujours droit de véto sur ses gouvernements, restera le décideur ultime.


Mais le temps presse…. Il faudra commencer dès 2018! Le talent, les outils ne manquent pas. Ce qui nous manque, c'est un gouvernement indépendantiste avec la volonté de nous sortir du bourbier, de mettre en marche le projet souverainiste et d'inviter chacun, chacune, à y travailler. Démocratiquement. Dans la légalité. Dans la légitimité. Dans la paix. Dans l'affirmation d'une souveraineté reconnue, jusqu'à la création de ce pays qui nous ressemble... ou jusqu'à ce que le peuple en décide autrement.

Ce dont nous n'avons surtout pas besoin, c'est de savoir s'il y aura ou non un ultime rendez-vous référendaire... Trudeau père a imposé sa constitution anti-québécoise de 1982 sans référendum. Il a gouverné et laissé aux citoyens le soin de le juger au scrutin suivant. Alors gouvernons, nous aussi!

Que se passera-t-il en 2019, en 2020, en 2021, après? Je n'en sais rien. Personne ne sait ce que les événements nous réservent. Ce que l'on appréhende, cependant, c'est qu'un référendum au programme, tout de suite ou plus tard, ne soit rien d'autre qu'un suicide politique. Le temps est à l'action. Sinon, la déprime collective, déjà perceptible, s'accentuera. Sur le succès ou l'échec de ces actions, un Québec indépendant verra le jour... ou l'histoire de notre peuple se terminera sur «une page blanche»...

À force de préparer et d'attendre un grand soir référendaire, nous risquons de ne jamais faire l'essentiel premier pas… puis le deuxième...

Alors, cher Monsieur Lisée, portez-nous bien...







mercredi 5 octobre 2016

Pourquoi «Lettres du front»?

Mon premier blogue, lancé en 2011, me donnait ces derniers jours des maux de tête, Twitter semblant y voir - pour je ne sais quelle raison - un risque de sécurité pour les usagers. Je n'en crois rien, mais le fait demeure que plus d'un internaute l'a évité, craignant sans doute l'apparition d'un virus ou de quelque autre infection informatique… Enfin, la meilleure solution, me semble-t-il, est de créer une deuxième adresse dans la blogosphère…

Alors voilà! Et tant qu'à y être, pourquoi pas un titre un peu plus original que «Pierre Allard, le blogue»? Au début, en 2011, j'avais eu l'idée de l'intituler «Crier dans le désert», tellement j'étais habitué - depuis la fin de mon adolescence - à combattre sans trop de succès pour des causes que j'estimais pourtant justes et nobles… l'amour, la langue française, la justice sociale, l'égalité de tous les humains, la fraternité, la création d'un pays à notre image…

N'ayant aucun antécédent comme blogueur, et conscient que l'expérience pourrait être de très courte durée, j'ai finalement opté pour un titre plate… et misé sur le mérite du contenu… En date d'octobre 2016, j'ai signé plus de 500 textes de blogue, et rejoint des dizaines de milliers de lecteurs et lectrices depuis cinq ans.

Que mes textes soient populaires ou pas importe peu… À un correspondant qui me disait marginal dans les circuits Twitter et Facebook, j'avais répondu que je tenais plus à écrire, à m'exprimer, qu'à être lu…

Ayant jeté un long regard sur ce que j'ai pondu, tant à l'époque où j'étais éditorialiste au quotidien Le Droit qu'après (c.-à-d. depuis juin 2014), et passé en revue mes principaux secteurs d'intérêt, je propose donc de donner à ce nouveau blogue le titre «Lettres du front»…

J'ai sans doute été influencé par ma lecture toute récente de Lettres de mon phare, d'Antonine Maillet, un livre délicieux, dont j'ai aimé le titre.

Mais j'ai souvent l'impression, de mon avant-poste de Gatineau, sur les rives de l'Outaouais, presque à vue de mon ancien quartier franco-ontarien d'Ottawa, de scruter d'un oeil à la fois critique et engagé les horizons québécois et franco-canadiens - passés, présents et futurs.

De grands combats s'y déroulent depuis plus de 250 ans, des combats dont l'enjeu restera toujours notre survie collective comme peuple, comme nation. Et j'ai la conviction d'occuper un poste d'observation et d'intervention situé tout près du front…

Avec un bagage de plus de 40 ans de journalisme, comme reporter, comme éditorialiste, comme gestionnaire, j'utilise les techniques apprises pour écrire ce que je vois, ce que je pense, et le communiquer par les moyens qu'offrent aujourd'hui les réseaux sociaux.

J'entretiens ainsi une forme de correspondance avec mes concitoyens et concitoyennes du Québec, mais aussi avec mes frères et soeurs francophones de l'Ontario, de l'Ouest et de l'Acadie.

Mes textes seront en quelque sorte des lettres que je leur adresse, de mon «repaire» assez particulier, tout juste en terre québécoise, mon fleurdelisé flottant dans l'ombre du Parlement canadien.

Mes lettres du front...

mardi 4 octobre 2016

Poignard judiciaire dans la Loi 101...

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Le 9 mars 2017, la Cour suprême du Canada a maintenu le jugement ci-dessous de la Cour d'appel du Québec... Misère...
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La Cour d'appel du Québec vient de fracturer le principe même d'un article primordial de la Loi 101 (celui du français, langue de travail) et la nouvelle - sans doute parce l'affaire ne se déroule pas à Montréal - ne semble pas intéresser grand monde… Cela aurait dû, ce mercredi 5 octobre 2016, trôner en manchette de tous les médias de langue française au Québec…

La nouvelle, fort bien expliquée par Stéphanie Marin, journaliste de la Presse canadienne (voir bit.ly/2dtV8Ap), a été jusqu'à maintenant diffusée sur les sites Web du quotidien Le Droit et de Radio-Canada (région Ottawa-Gatineau). Le Droit a aussi publié un résumé incomplet dans son édition papier. Était-ce un premier jet de Mme Marin ou un charcutage maison? Sais pas, mais cela s'ajoute aux erreurs de présentation du quotidien en août 2015, dans une manche précédente de la même guerre judiciaire (voir plus bas).

Alors qu'en est-il, au juste? Au départ il s'agit de savoir si la connaissance de l'anglais est requise pour un pauvre petit poste de commis aux finances à la ville de Gatineau. Le syndicat dit non. La ville dit oui. Un grief est déposé et l'arbitre est saisi de l'affaire. En cause, l'article 46 de la Charte de la langue française, qui stipule: «Il est interdit à un employeur d'exiger pour l'accès à un emploi ou à un poste la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d'une langue autre que la langue officielle, à moins que l'accomplissement de la tâche ne nécessite une telle connaissance.»

L'arbitre René Turcotte donne raison au syndicat, et son jugement s'appuie carrément sur le sens de cette notion de nécessité ou pas de l'anglais (ou de toute autre langue que le français) au travail. «La nécessité ne doit pas être confondue avec l'utilité, l'opportunité, la qualité du service offert par un employeur», écrivait-il. La ville de Gatineau a porté le jugement arbitral en appel à la Cour supérieure, qui a maintenu la décision de première instance. Cette décision est celle qui a donné lieu (en août 2015) aux titres pour le moins fantaisistes en pages une et trois du Droit, ainsi que sur son site Web.

La ville, voulant à tout prix un candidat bilingue pour son poste de commis aux finances, a investi d'autres fonds publics pour attaquer deux décisions, arbitrale et judiciaire, en sachant fort bien qu'elle attaquait aussi la portée de la Loi 101 dans une région où le français est déjà fragilisé. Or, voilà, qu'elle vient de gagner cette troisième manche (et non la première comme l'indique le titre) et que, ce faisant, elle vient d'ébranler un pan entier de la protection judiciaire du français comme langue de travail.


Car le juge Yves-Marie Morrissette, de la Cour d'appel, vient carrément de dire, dans son jugement, que la notion de nécessité (de l'anglais ou de toute autre langue) est beaucoup plus élastique que l'on croyait… Au fond, les législateurs ont écrit le mot «nécessaire» mais ce n'est pas vraiment dans un sens restrictif… Et ce juge, se substituant à l'Assemblée nationale, vient inclure d'autres facteurs pour arriver à un niveau «souhaitable» (plutôt que nécessaire) de connaissances linguistiques, ce niveau pouvant varier de façon plus ou moins floue selon les lieux de travail ou même selon la réalité linguistique des différentes régions du Québec…

À moins que j'aie mal compris le sens de ce jugement et le texte de Mme Marin, c'est un coup de poignard judiciaire en plein coeur d'un article clé de ce qui reste de la Loi 101… Un grand pas en direction du bilinguisme à volonté au travail… Allô, y a quelqu'un à l'écoute dans les médias?

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J'avais, en août 2015, rédigé un texte de blogue sur cette question, texte que j'ai tout de suite retiré des lieux publics de l'Internet pour en faire un simple courriel privé à la direction de la salle des nouvelles, espérant que les grossières erreurs de titrage (rien à redire sur le texte de Mathieu Bélanger) fassent l'objet d'une correction. Je n'ai même pas reçu d'accusé de réception... J'ai conservé ce texte de blogue, que j'inclus ici...
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vendredi 14 août 2015



Pas d'anglais à la ville de Gatineau? Vraiment?

Des erreurs dans les titres, il s'en produit tous les jours, dans tous les journaux et dans tous les sites Web médiatiques… mais la manchette de la page une du quotidien Le Droit de ce matin mérite une mention. Le titre en question se lit comme suit, en majuscules: «PAS D'ANGLAIS À LA VILLE», précédé d'une exergue, aussi en lettres majuscules: «GATINEAU PERD UNE BATAILLE JUDICIAIRE».

Quelle impression vous laisse ce titre, si vous ne lisez pas le texte en page 3 du journal? Que Gatineau veut de l'anglais à la ville (???) et qu'un tribunal lui a dit qu'il n'y aurait pas d'anglais à la ville. Donc, que Gatineau cherche peut-être à devenir bilingue, et qu'un tribunal a dit non. Que Gatineau restera unilingue française. Qu'il n'y aura «pas d'anglais à la ville»… C'est trompeur.

Dans le texte, l'auteur précise que l'enjeu porte sur un seul poste de commis aux finances, au sein de l'administration municipale. Le Syndicat des cols blancs a déposé un grief quand la ville a voulu exiger une connaissance de l'anglais. Et un tribunal (confirmant une décision arbitrale) redit à la ville, en invoquant la Loi 101, que l'anglais ne peut être exigé pour un poste que lorsqu'il est nécessaire. Utile ne suffit pas. Ce doit être «nécessaire» et dans ce cas précis, la ville de Gatineau n'a pas démontré la nécessité de l'anglais.

Comment peut-on passer d'un litige sur un poste de commis aux finances pour en arriver au titre «PAS D'ANGLAIS À LA VILLE», quand on sait que la ville de Gatineau offre une gamme relativement complète de services en anglais et qu'une forte proportion, sans doute la majorité, de ses employés sont bilingues? Dans les faits, Gatineau est probablement bien plus bilingue que la capitale, Ottawa, de l'autre côté de la rivière.

Le titre qui accompagne le texte sur le site Web du Droit est encore plus précis que celui, plutôt vague, de la page une et, à cet égard, encore plus faux. On y lit: «L'anglais n'est pas nécessaire à la Ville de Gatineau, tranche la Cour supérieure».
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Publié le 14 août 2015 à 05h00 | Mis à jour à 05h00


L'anglais n'est pas nécessaire à la Ville de Gatineau, tranche la Cour supérieure

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Le texte est pourtant très clair. L'affaire ne porte que sur un poste de commis aux finances. Jamais, selon le texte, le conflit n'a-t-il porté sur la «nécessité» de l'anglais dans l'ensemble de l'administration municipale de Gatineau. La Cour supérieure n'a donc pas statué que «l'anglais n'est pas nécessaire à la Ville de Gatineau». Elle n'a jugé qu'un seul poste, celui qui était l'objet d'un grief, et rappelé la règle générale qui doit guider la ville dans ce genre de cas.

Jamais deux sans trois, dit-on. Il y a un dernier titre, celui de la page 3 du journal, celui qui accompagne le texte imprimé. On peut y lire: «L'anglais n'est pas nécessaire», suivi de «La Ville de Gatineau ne peut pas exiger de ses employés qu'ils soient bilingues, tranche la Cour supérieure». Encore une fois, une erreur.

La Ville peut exiger d'un employé qu'il soit bilingue si, dans la fonction qu'il occupe, l'anglais est une nécessité. La Ville doit démontrer cette nécessité. Si elle en fait la preuve, elle peut exiger de certains employés qu'ils soient bilingues… Misère...

Après publication de ces trois titres, Le Droit devrait offrir des excuses et un correctif. S'il ne le fait pas, il accrédite trois erreurs. 

NB - Le Droit ne s'est pas, à ma connaissance, excusé de ces erreurs de titres…